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Prédication du 15 novembre

Prédication sur 1 Thessaloniciens5,1-6.  

1Vous n'avez pas besoin, frères et sœurs, qu'on vous écrive au sujet des temps et des moments où tout cela arrivera. 

2Car vous savez très bien vous-mêmes que le jour du Seigneur viendra de façon aussi imprévisible qu'un voleur pendant la nuit. 

3Quand les gens diront : « Tout est en paix, en sécurité », c'est alors que, tout à coup, la ruine s'abattra sur eux, comme les douleurs de l'accouchement surprennent une femme enceinte. Personne n'y échappera ! 

4Mais vous, frères et sœurs, vous n'êtes pas en pleine obscurité pour que ce jour vous surprenne comme un voleur. 

5Vous tous, en effet, vous êtes des personnes qui vivent dans la lumière, qui vivent en plein jour. Nous ne vivons ni dans la nuit ni dans l'obscurité. 

6Ainsi, ne dormons pas comme les autres ; mais restons éveillés et sobres. 

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lampe veiller

Faisons connaissance avec trois chrétiens. Chacun d’eux a une façon bien particulière d’aborder dans sa vie la question que se posaient les chrétiens de Thessalonique la fin des temps, et le retour du Seigneur. Appelons-les Robert, Irénée et Léa.

Commençons par Robert . Pour lui, la Bible contient un message qu’il faut savoir déchiffrer. Robert est persuadé en particulier qu’elle doit permettre d’interpréter les signes annonciateurs de la fin des temps, et donc de prévoir l’événement qu’il attend avec impatience, le retour de Jésus-Christ. Jésus n’a-t-il pas lui-même invité ses disciples à ce travail de décryptage ? Un passage de l’évangile selon Matthieu, au ch.24 (son chapitre favori) est souligné en rouge dans sa Bible : « Voyez l’enseignement du figuier, dit Jésus à ses disciples. Dès que ses rameaux deviennent tendres et que poussent ses feuilles, vous reconnaissez que l’été est proche. De même, vous aussi, quand vous verrez tout cela, sachez que le fils de l’homme est proche, qu’il est à vos portes ». 

Quand il ouvre sa Bible pour étudier son thème favori, c’est souvent au dernier livre que Robert se rend. L’Apocalypse!Car là, en fait de décryptage, il y a fort à faire. Que d’images et d’expressions mystérieuses qui sentent à plein nez le message codé… Mais heureusement la bibliothèque de Robert est pleine de commentaires, tous plus savants et ingénieux les uns que les autres, pour l’aider à trouver les clefs de ces énigmes et découvrir à quoi correspondent la bête, le faux-prophète, la grande Babylone, etc. Il s’est intéressé notamment à ces plaies qui frapperont l’humanité, selon le ch.8il y est question aux vv. 10 et 11 d‘un astre enflammé qui s’appelle «absinthe» qui rend toutes les eaux amères et empoisonne les hommes qui en boivent. Depuis qu’il a appris que Tchernobyl signifie en russe «absinthe»,il est certain que ce passage prédisait la catastrophe survenue en 1986 dans la fameuse centrale nucléaire. Quant au chiffre 666, le chiffre de la bête, il continue à se demander s’il désigne vraiment Néron, ou Hitler, ou bien Napoléon, ou bien Staline mais il n’a plus aucune hésitation sur Morceaux à conserver:

Le baiser ( Pierre Perret)ne porte la marque, le nom de la bête ou le chiffre de son nom»dit ce verset. C’est une allusion au fameux code-barre, désormais généralisé dans le commerce mondial. Encore un signe, sinon une preuve que la Bible avait tout prévu!

Bien sûr, Robert reste prudent et n’avale pas n’importe quoi,on lui a tellement dit que Gog et Magog, les ennemis de Dieu et de son peuple dans l’Apocalypse, désignaient la Russie que depuis la chute de l’union soviétique et l’éloignement d’une perspective d’un embrasement du conflit est-ouest,il devient plus circonspect… Mais il en faudrait plus pour décourager sa quête passionnée. La fin de ce monde, le jugement dernier, c’est un sujet central dans l’Ecriture. Alors, tant pis si d’autres frères et sœurs ne veulent pas entendre la vérité. Autant garder tout cela pour lui. Car ce que cherche Robert avec avidité, c’est d’avoir la garantie personnelle, l’absolue certitude que la Bible a dit vrai et qu’il verra de son vivant la venue du Fils de l’Homme. Quand il lit le journal ou regarde les informations télévisées, toute annonce d’une catastrophe, d’un tremblement de terre, de guerre et de bruits de guerre, d’inondations, voire de persécutions de croyants, l’attristent évidemment mais le confirment aussi dans la justesse de ses vues ! Robert contemple sans désespoir les soubresauts de ce monde mauvais, en train de mourir. Car ces soubresauts, pour lui, sont les signes avant-coureurs du triomphe des élus, et de l’avènement du monde nouveau. Il a d’ailleurs découragé récemment son meilleur ami dans l’Eglise de se marier, pour se consacrer plutôt à l’imminence de ce qui vient.

Passons à Irénée . Contrairement à Robert, la question de la fin des temps, il ne s’en préoccupe pas. L’Evangile, se dit-il, c’est avant tout aimer aujourd’hui son prochain, vivre aujourd’hui une vie droite et juste, c’est s’engager aujourd’hui au nom de Jésus-Christ pour faire reculer la violence, la faim, l’injustice, l’égoïsme, l’ignorance, la guerre et même le changement climatique et ses conséquences désastreuses. Ainsi, peut-être, pense Irénée, les efforts de tous les hommes de bonne volonté pourront-ils, selon la belle expression de l’apôtre Paul, « hâter » le Royaume de Dieu, qu’il n’hésite pas à identifier à ce monde où nous vivons, mais renouvelé, complètement réconcilié avec son créateur. En tout cas ce qui l’intéresse, c’est l’aujourd’hui et tous les défis du présent. Autrement dit le concret !

Irénée est un homme généreux, ouvert aux autres, prêt à donner de son temps. Il milite d’ailleurs activement dans l’entraide de son Eglise, il soutient plusieurs oeuvres humanitaires et a connu, avant de prendre sa retraite, un long engagement associatif et politique. Toutefois, les années passant, Irénée connaît un certain découragement. Il a vu tant de ses espoirs dans le progrès de l’homme trahis. Il a été si souvent déçu de voir ses efforts rester apparemment sans effets, en tout cas sans effets durables. Et quand il lui arrive encore de dire le Notre Père, au moment de prononcer la 2e demande«que ton règne vienne»il ne peut s’empêcher d’ajouter silencieusement«ce n’est pas pour demain»Mais il continue quand même.

Et puis, il y a Léa.  Comme Robert, Léa a lu avec intérêt tous ces textes du Nouveau Testament où Jésus annonce son retour. Comme Irénée, Léa croit que le Royaume de Dieu est proche là où tout acte de justice, de paix, d’amour est posé sur cette terre

Mais quelque chose a retenu son attention, c’est qu’il est souvent question d’étonnement et de surprise lorsqu’un passage du Nouveau Testament évoque la fin des temps. «Nul ne sait ni le jour ni l’heure», disait Jésus, et il a même osé se comparer à un cambrioleur! : «je viendrai comme un voleur dans la nuit». Paul lui fait écho en renonçant à en dire plus long aux chrétiens de Thessalonique au sujet des temps et des moments où cela arrivera. Léa n’est certaine que d’une chose, c’est que de toutes façons la venue du Seigneur la surprendra, et nous surprendra tous. Il n’est pas possible de la prévoir, tout au plus peut-on s’y préparer.

Cela la réjouit plutôt Léa, car en fait de surprises, depuis qu’elle croit en Jésus-Christ, elle sait que le Seigneur lui en réserve de bonnes, d’excellentes, même. Alors elle attend le Seigneur, car la croix de Jésus-Christ, sa mort et sa résurrection, lui ont ouvert une espérance, lui ont donné la conviction de l’amour indéfectible du Seigneur pour elle et pour ce monde. Elle compte sur lui, et chaque fois qu’elle prend connaissance d’une tragédie, qu’elle est confrontée à un drame ou une souffrance individuelle ou collective, alors de ses lèvres monte une prière«reviens, Seigneur». Reviens pour cette famille brisée, reviens pour ce malade, reviens pour ces victimes d’attentats, reviens pour ce pauvre qui tend la main, pour ces enfants affamés... Reviens pour ce monde que tu aimes au point de lui avoir donné ton fils. Et Léa se tient prête, reste éveillée. Active, un peu comme Irénée, mais sans compter trop sur elle-même ni sur l’humain. Pessimiste sur le monde présent et impatiente du monde qui vient, un peu comme Robert, mais sans chercher à s’enivrer de spéculations et à se satisfaire d’une attente passive.

Ce qu’elle peut faire, Léa le fait au quotidien. Libérée de toute rêverie, comme de tout découragement. Car elle croit que depuis le matin de Pâques, quelque chose a changé, la mort a reculé et la victoire du Seigneur est certaine. C’est depuis ce jour-là que la fin est proche.

Parfois elle pense à ce jour où elle verra le Seigneur face à face, où elle connaîtra enfin comme elle a été connue. Elle n’ose pas se le représenter car elle sait que ce sera encore plus fort, encore plus beau que tout ce qu’elle pourrait imaginer. Mais elle s’en réjouit déjà, et cela lui donne du cœur à l’ouvrage, au service du Seigneur et du prochain.

Frères et sœurs, il est temps de vous avouer que Irénée, Robert et Léa n’existent pas. Ou du moins, pas à «l’état pur». Il y a certainement dans les veilleurs que le Seigneur nous appelle à devenir, dans des proportions variables selon les cas, un peu de Robert, un peu d’Irénée, un peu enfin de Léa qui ne comprend pas tout, qui ne sait pas tout non plus mais qui fait confiance au Seigneur et espère en ses promesses, quoi qu’il advienne. La question qui nous est posée ce matin, dans l’appel de l’apôtre Paul à attendre dans la vigilance et la sobriété, c’est«auquel des trois voulons-nous le plus ressembler?».

AMEN.  

Pasteur Christophe Desplanque